La Louise

Publié le par Annie

La " Louise " était la porteuse de bonnes et mauvaises nouvelles, au porte à porte, dans le village : les morts, les nouveaux nés, l'heure de la messe du dimanche, le mariage d'untel et la communion du petit dernier, mais aussi le passage du marché et la venue d'une personnalité à la mairie...

Elle était toujours vêtue d'une robe noire avec un col blanc de dentelle, robe de deuil qu'elle portait depuis la mort de son p'tit gars, de la vilaine maladie qui sévissait à l'époque, la tuberculose. Un beau tablier bleu enveloppait le tout. Elle était coiffée d'un petit chignon bas, coincé dans le cou par une épingle de coiffe et enveloppé d'un filet brodé, qu'elle fabriquait elle-même, en soirée, avec ses navettes et sa petite table ronde de dentellière, pour se faire un peu de sous, les cheveux déjà blancs auréolant son visage au nez aquilin.

Elle avait été également mère nourricière de nombreux enfants du village et bonne à tout faire dans les maisons bourgeoises. Je l'adorais. Elle fut une grand-mère d'occasion, mais elle comptait beaucoup pour moi ; elle me racontait les choses de la vie, avec son accent du terroir et son bon sens percheron : " T'inquiète pas, fille, l'gars Josse, i't'aime, y m'la dit l'aut' jour à la messe... Pourquoi c'est'y qu't' y viens point ? Tu'le verrais, à c't'heure ! As-tu point fait ta communion ? ".

Effarée qu'elle était par notre côté païen, elle ne s'y faisait pas ! Elle repose aujourd'hui dans le petit cimetière, en haut du coteau. Personne ne vient plus lui porter de fleurs, sauf moi, ce qui étonne les méchantes langues du village, qui me suivent des yeux et tendent le cou pour voir où je dépose ma potée et entendre ce que je lui dis ! Elle aurait 105 ans.

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